samedi, septembre 04, 2010

jeudi, avril 19, 2007

Epicurisme!

Résumons très succintement les points clefs de la philosophie d'Epicure, explicités par le texte ci-joint:
- Ce qui n'est pas douleur est plaisir.
- Il faut savoir savouer chaque moment (plaisir peut-être dans chaque chose) (reprise du Carpe Diem d'Horace)
- Le mal est acceptable si il précède un plus grand bien (si le plaisir > douleur)
- L'épicurisme n'est ni un hédonisme (rechercher un maximum de satisfaction) ni un ascétisme (vie austère, frugale...)









[...]
Il faut se rendre compte que parmi nos désirs les uns sont naturels, les autres vains, et que, parmi les désirs naturels, les uns sont nécessaires et les autres naturels seulement. Parmi les désirs nécessaires, les uns sont nécessaires pour le bonheur, les autres pour la tranquillité du corps, les autres pour la vie même. Et en effet une théorie non erronée des désirs doit rapporter tout choix et toute aversion à la santé du corps et à l'ataraxie de l'âme, puisque c'est là la perfection même de la vie heureuse. Car nous faisons tout afin d'éviter la douleur physique et le trouble de l'âme. Lorsqu'une fois nous y avons réussi, toute l'agitation de l'âme tombe, l'être vivant n'ayant plus à s'acheminer vers quelque chose qui lui manque, ni à chercher autre chose pour parfaire le bien-être de l'âme et celui du corps. Nous n'avons en effet besoin du plaisir que quand, par suite de son absence, nous éprouvons de la douleur ; et quand nous n'éprouvons pas de douleur nous n'avons plus besoin du plaisir.

C'est pourquoi nous disons que le plaisir est le commencement et la fin de la vie heureuse. En effet, d'une part, le plaisir est reconnu par nous comme le bien primitif et conforme à notre nature, et c'est de lui que nous partons pour déterminer ce qu'il faut choisir et ce qu'il faut éviter ; d'autre part, c'est toujours à lui que nous aboutissons, puisque ce sont nos affections qui nous servent de règle pour mesurer et apprécier tout bien quelconque si complexe qu'il soit. Mais, précisément parce que le plaisir est le bien primitif et conforme à notre nature, nous ne recherchons pas tout plaisir, et il y a des cas où nous passons par-dessus beaucoup de plaisirs, savoir lorsqu'ils doivent avoir pour suite des peines qui les surpassent ; et, d'autre part, il a des douleurs que nous estimons valoir mieux que des plaisirs, savoir lorsque, après avoir longtemps supporté les douleurs, il doit résulter de là pour nous un plaisir qui les surpasse. Tout plaisir, pris en lui-même et dans sa nature propre, est donc un bien, et cependant tout plaisir n'est pas à rechercher ; pareillement, toute douleur est un mal, et pourtant toute douleur ne doit pas être évitée. En tout cas, chaque plaisir et chaque douleur doivent être appréciés par une comparaison des avantages et des inconvénients à attendre. Car le plaisir est toujours le bien, et la douleur le mal ; seulement il y a des cas où nous traitons le bien comme un mal, et le mal, à son tour, comme un bien.

C'est un grand bien à notre avis que de se suffire à soi-même, non qu'il faille toujours vivre de peu, mais afin que si l'abondance nous manque, nous sachions nous contenter du peu que nous aurons
, bien persuadés que ceux-là jouissent le plus vivement de l'opulence qui ont le moins besoin d'elle, et que tout ce qui est naturel est aisé à se procurer, tandis que ce qui ne répond pas à un désir naturel est malaisé à se procurer. En effet, des mets simples donnent un plaisir égal à celui d'un régime somptueux si toute la douleur causée par le besoin est supprimée, et, d'autre part, du pain d'orge et de l'eau procurent le plus vif plaisir à celui qui les porte à sa bouche après en avoir senti la privation. L'habitude d'une nourriture simple et non pas celle d'une nourriture luxueuse, convient donc pour donner la pleine santé, pour laisser à l'homme toute liberté de se consacrer aux devoirs nécessaires de la vie, pour nous disposer à mieux goûter les repas luxueux, lorsque nous les faisons après des intervalles de vie frugale, enfin pour nous mettre en état de ne pas craindre la mauvaise fortune. Quand donc nous disons que le plaisir est le but de la vie, nous ne parlons pas des plaisirs voluptueux et inquiets, ni de ceux qui consistent dans les jouissances déréglées, ainsi que l'écrivent des gens qui ignorent notre doctrine, ou qui la combattent et la prennent dans un mauvais sens. Le plaisir dont nous parlons est celui qui consiste, pour le corps, à ne pas souffrir et, pour l'âme, à être sans trouble. Car ce n'est pas une suite ininterrompue de jours passés à boire et à manger, ce n'est pas la jouissance des jeunes garçons et des femmes, ce n'est pas la saveur des poissons et des autres mets que porte une table somptueuse, ce n'est pas tout cela qui engendre la vie heureuse, mais c'est le raisonnement vigilant, capable de trouver en toute circonstance les motifs de ce qu'il faut choisir et de ce qu'il faut éviter, et de rejeter les vaines opinions d'où provient le plus grand trouble des âmes.
[...]

lundi, avril 16, 2007

Spéculations?


Lettres à Lucilius - Lettre XIII

[...]
ce que je te recommande, c’est de ne pas te faire malheureux avant le temps ; car ces maux, dont l’imminence apparente te fait pâlir, peut-être ne seront jamais, à coup sûr ne sont point encore. Nos angoisses parfois vont plus loin, parfois viennent plus tôt qu’elles ne doivent ; souvent elles naissent d’où elles ne devraient jamais naître. Elles sont ou excessives, ou chimériques, ou prématurées. Le premier de ces trois points étant controversé et le procès restant indécis, n’en parlons pas quant à présent. Ce que j’appellerais léger, tu le tiendrais pour insupportable ; et je sais que des hommes rient sous les coups d’étrivières, que d’autres se lamentent pour un soufflet. Plus tard nous verrons si c’est d’elles-mêmes que ces choses tirent leur force ou de notre faiblesse. En attendant promets-moi, quand tu seras assiégé d’officieux qui te démontreront que tu es malheureux, de ne point juger sur leurs dires, mais sur ce que tu sentiras : consulte ta puissance de souffrir, appelles-en à toi-même qui te connais mieux que personne : « D’où me viennent ces condoléances ? quelle peur agite ces gens ? ils craignent jusqu’à la contagion de ma présence, comme si l’infortune se gagnait ! Y a-t-il ici quelque mal réel ; ou la chose ne serait-elle point plus décriée que funeste ? » Adresse-toi cette question : « N’est-ce pas sans motif que je souffre, que je m’afflige ; ne fais-je point un mal de ce qui ne l’est pas ? » – « Mais comment voir si ce sont chimères ou réalités qui causent mes angoisses ? » Voici à cet égard la règle. Ou le présent fait notre supplice, ou c’est l’avenir, ou c’est l’un et l’autre. Le présent est facile à apprécier. Ton corps est-il libre, est-il sain, aucune disgrâce n’affecte-t-elle ton âme, nous verrons comment tout ira demain, pour aujourd’hui rien n’est à faire. « Mais demain arrivera. » Examine d’abord si des signes certains présagent la venue du mal, car presque toujours de simples soupçons nous abattent, dupes que nous sommes de cette renommée qui souvent défait des armées entières, à plus forte raison des combattants isolés. Oui, cher Lucilius, on capitule trop vite devant l’opinion : on ne va point reconnaître l’épouvantail, on n’explore rien, on ne sait que trembler et tourner le dos comme les soldats que la poussière soulevée par des troupeaux en fuite a chassés de leur camp, ou qu’un faux bruit semé sans garant frappe d’un commun effroi. Je ne sais comment le chimérique alarme toujours davantage : c’est que le vrai a sa mesure, et que l’incertain avenir reste livré aux conjectures et aux hyperboles de la peur. Aussi n’est-il rien de si désastreux, de si irrémédiable que les terreurs paniques : les autres ôtent la réflexion, celles-ci, jusqu’à la pensée. Appliquons donc ici toutes les forces de notre attention. Il est vraisemblable que tel mal arrivera, mais est-ce là une certitude ? Que de choses surviennent sans être attendues, que de choses attendues ne se produisent jamais ! Dût-il même arriver, à quoi bon courir au-devant du chagrin ? il se fera sentir assez tôt quand il sera venu : d’ici là promets-toi meilleure chance. Qu’y gagneras-tu ? du temps. Mille incidents peuvent faire que le péril le plus prochain, le plus imminent, s’arrête ou se dissipe ou aille fondre sur une autre tête. Des incendies ont ouvert passage à la fuite ; il est des hommes que la chute d’une maison a mollement déposés à terre ; des têtes déjà courbées sous le glaive l’ont vu s’éloigner, et le condamné a survécu à son bourreau. La mauvaise fortune aussi a son inconstance. Elle peut venir comme ne venir pas : jusqu’ici elle n’est pas venue : vois le côté plus doux des choses. Quelquefois, sans qu’il apparaisse aucun signe qui annonce le moindre malheur, l’imagination se crée des fantômes ; ou c’est une parole de signification douteuse qu’on interprète en mal, ou l’on s’exagère la portée d’une offense, songeant moins au degré d’irritation de son auteur qu’à tout ce que pourrait sa colère. Or la vie n’est plus d’aucun prix, nos misères n’ont plus de terme, si l’on craint tout ce qui en fait de maux est possible. Que ta prudence te vienne en aide, emploie ta force d’âme à repousser la peur du mal même le plus évident ; sinon, combats une faiblesse par une autre, balance la crainte par l’espoir. Si certains que soient les motifs qui effraient, il est plus certain encore que la chose redoutée peut s’évanouir, comme celle qu’on espère peut nous décevoir. Pèse donc ton espoir et ta crainte, et si l’équilibre en somme est incertain, penche en ta faveur et crois ce qui te flatte le plus. As-tu plus de probabilités pour craindre, n’en incline pas moins dans l’autre sens et coupe court à tes perplexités. Représente-toi souvent combien la majeure partie des hommes, alors qu’ils n’éprouvent aucun mal, qu’il n’est pas même sûr s’ils en éprouveront, s’agitent et courent par tous chemins. C’est que nul ne sait se résister, une fois l’impulsion donnée, et ne réduit ses craintes à leur vraie valeur. Nul ne dit : « Voilà une autorité vaine, vaine de tout point : cet homme est fourbe ou crédule. » On se laisse aller aux rapports ; où il y a doute, l’épouvante voit la certitude ; on ne garde aucune mesure, soudain le soupçon grandit en terreur.

J’ai honte de te tenir un pareil langage et de t’appliquer d’aussi faibles palliatifs. Qu’un autre dise : « Peut-être cela n’arrivera-t-il pas ! » Tu diras, toi : « Et quand cela arriverait ? Nous verrons qui sera le plus fort. Peut-être sera-ce un heureux malheur, une mort qui honorera ma vie. » La ciguë a fait la grandeur de Socrate : arrache à Caton le glaive qui le rendit à la liberté, tu lui ravis une grande part de sa gloire.
[...]

Taille ta propre statue - Plotin


Depuis qu'il était petit, Michel di
Lodovico n'avait d'yeux que pour les
sculptures dans les églises, les bustes
de madone et les chérubins de marbre.

Cette obsession lui avait permis de
survivre à bien des malheurs.

Ses parents étaient pauvres et, s'il
n'avait été le plus talentueux de tous
les jeunes apprentis sculpteurs du village,
jamais il n'aurait obtenu une bourse pour
suivre des cours en ville.

Mais, orphelin à 15 ans, il avait dû
brader son talent pour survivre en
taillant des stèles funéraires chez un
artisan florentin.

Le soir, épuisé par le travail, il
trouvait encore la force de suivre des
cours chez Domenico, le célèbre
sculpteur.

Mais celui-ci mourut avant que Michel
n'ait pu obtenir de lui une lettre de
recommandation pour exercer son art,
comme c'était alors la coutume.

Le jeune sculpteur dut accepter les
besognes les plus viles et supporter
encore deux longues années la honte de
n'être qu'un petit paysan inconnu du
public. Parfois même il devait mendier
pour ne pas mourir de faim.

Cependant, dès qu'il avait un moment,
il se faufilait dans les églises ou les
chapelles, pour admirer les sculptures
et apprendre dans leurs lignes, leurs
courbes et leurs rotondités les
derniers secrets de son art.

Un soir, alors qu'il était en extase
devant une madonna col bambino dans
l'église de santa maria novella, il eut
une illumination et comprit ce que
d'autres n'avaient pas même entrevus.

A partir de ce jour, il se mit à
sculpter les plus belles pièces que
l'art ait jamais comptées. Il devint
alors célèbre dans le monde entier,
sous le nom de Michel Angelo.

Quand, à la fin de sa vie, son
apprenti lui demanda quel était sa
définition de la sculpture, Michel
Angelo lui sourit et dit :

- Je vais te répéter ce que les anges
m'ont conseillé ce fameux soir dans une
église de Florence. "Prends un bloc de
marbre et taille tout ce qui ne fait
pas partie de la statue."

dimanche, avril 08, 2007

Millenium 2K7: L'eau à la bouche.


jeudi, avril 05, 2007

Avides mécréants!


(article inspiré de Challenge de mars 2k7)

Le capitalisme mondialisé de notre époque, s'il constitue un moyen efficace de gestion de capitaux faramineux, présente une tare majeure: conforter les inégalités, et récompenser outrageusement des acteurs peu méritants.

A partir de l'histoire de scandales récents, proposons des règles de bon sens, des règles "capitales":

Syndrome Messier ou règle numéro 1: ne pas récompenser l'échec. Un salarié qui commet une faute peut être licencié .. et pas de golden parachute! Quand une entreprise perd de l'argent, le bonus de son PDG devrait sauter intégralement.

Syndrome Bernard ou règle numéro 2: ne pas déconnecter les gains du PDG e son travail, de ce qu'il fait réellement pour l'entreprise -et j'attends qu'un libéral réfute l'idée de récompenser l'agent selon sa productivité!-
Faut-il augmenter un patron qui rachète les cours de son entreprise pour gonfler artificiellement le cours?

Syndrome Zacharias ou règle numéro 3: jouer la clarté! Maintenir le flou dans le calcul des rémunération est un sport qui fait des ravages dans les états-majors. Le bonus de Zacharias dépendait d'un nombre de critères invraisemblables. Le confus favorise l'inéquité!

Syndrome Jaffré ou règle numéro 4: anticiper. A supposer, chose étrange d'ailleurs, qu'un golden parachute soit légitime, il ne pourrait être signer à la dernière minute mais devfrait avoir été mis en place au moment de l'arrivée du PDG dans l'entreprise.

Syndrome Fourtou ou règle numéro 5: ne pas surpayer le succès. C'est peut-être l'opération la moins aisée à mettre en pratique. Pourtant tout ne devrait pas être permis aux patrons qui réussissent. Henri de Castries a "well-done" à la tête d'Axa, mais mérite-t-il tout de même les sommes qu'il reçoit? 3156 Millions d'€ (sans prendre en compte les 153 millions en stock options), ne serait-ce pas un peu démesuré? Dites moi que son travail est 10^6 fois plus méritant que celui d'un petit artisan talentueux?

Pierre-Henri Leroy, directeur de Proxinvest, avance une solution radicale: plafonner le salaire des dirigeants, par exemple à 250 fois le smic (soit environ 3.5M d'€, puisque le smic fr est à 1173€ brut). Imaginez que si cette valeur comprend les stock-options et les actions gratuites attribuées pour l'année.
SEULS les PDG de société en crise comme Thomson passeraient sous la toise!

"L'homme intelligent qui est fier de sa propre intelligence est comme le condamné qui est fier de sa large cellule" Simone Weil


Chaque année, Dom Cornillo ouvrait le
parloir de sa petite église de campagne
et recevait la visite des jeunes gens
des villages alentours.

On venait d'assez loin pour
recueillir un avis, un conseil,
une formule à méditer.

Une jeune fille de bonne famille plia
sa longue robe et s'agenouilla aux
pieds du prêtre.

- Mon père, je voudrais devenir une
sainte. Que dois-je faire ?

- Suis ton coeur et ne t'éloigne jamais
de la route qu'il te trace, répondit
Dom Cornillo.

Cette réponse plut à la jeune fille
qui se dit : comme il est facile de
devenir une sainte ! Il suffit de
suivre les élans de son coeur.

Mais avant qu'elle ne se relève et
ne quitte la petite église, le prêtre
ajouta :

- Pour suivre ton coeur, tu auras
besoin d'une forte constitution et ta
vie ne sera que sacrifices.

______________________________

Le message de Dom Cornillo est-il
incohérent ? Non, il a parfaitement
raison :
écouter son coeur, c'est exiger de soi
une volonté sans faille.
Il ne s'agit pas de vivre selon
l'inspiration du jour, au contraire :
il faut sonder la sagesse de son coeur
et surtout ne pas baisser les bras, ne
pas se contenter de peu, ne pas sombrer
dans l'autosatisfaction.
Ecouter son coeur, c'est d'abord être
dur envers soi-même et ne jamais brader
ses exigences morales.